Altered Carbon [Saison 1] : Immortalité envers humanité

Dans un futur où les humains peuvent transférer leur conscience d’un corps à l’autre, l’esprit de Takeshi Kovacs, ancien soldat et seul survivant d’un groupe de guerriers d’élite vaincus lors d’un soulèvement contre le nouvel ordre mondial, est emprisonné « dans la glace » pendant des siècles, jusqu’à ce que Laurens Bancroft, un homme extrêmement riche et vivant depuis plusieurs siècles décide de le ramener à la vie 250 ans après sa mort, ceci dans le but de lui offre la chance de vivre à nouveau. En échange, Kovacs doit résoudre un meurtre … celui de Bancroft lui-même.

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| Notre existence se trouve entre deux éternités.

La toute-puissance de l’Immortalité contre l’humble reste de l’Humanité ; l’opulence contre la misère ; la Vie contre la Mort. C’est autour de ces différents mots et concepts que défilent finalement les différents épisodes qui sont eux-mêmes articulés autour d’une enquête morbide.

Ces élites, ne craignant alors plus mort et trépas, vivent au-dessus des nuages, dans cette perpétuelle et impossible quête d’approcher un peu plus le Paradis céleste.

Dans un futur indéterminé où l’humanité est parvenu à étendre inexorablement son emprise sur plusieurs planètes, des puces à l’arrière du crâne de ceux qui les adoptent permettent désormais de stocker l’intégralité de ce qui constitue un esprit humain. Lorsque le corps meurt, la conscience est ainsi sauvegardée et peut être transférée dans une nouvelle enveloppe corporelle.

Cette technologie permet ainsi de faire de la condition humaine chose nouvelle, de dépasser l’inéluctabilité de la mort, de passer outre la perte de proches, ou bien encore de permettre à des victimes de meurtre de s’exprimer pour désigner leurs agresseurs.

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| Dieu est mort, nous l’avons remplacé.

Mais ce qui apparaissait au début comme une révolution pour l’humanité a été, comme souvent, corrompu, et a permis aux individus les plus aisés d’augmenter bien davantage leur statut privilégié, ceci en accédant à une forme d’immortalité. Là où auparavant tout le monde était logé à la même enseigne, la mort se chargeant de délivrer le même sort à tous, dorénavant, l’inégalité est devenue plus criante et inacceptable que jamais.

Dans un monde où vieillir n’est plus, la famille est, elle aussi, plus que perturbée. Comment la nouvelle génération peut-elle alors muer et s’élever, lorsque les parents persistent à régner ?

Ces élites, ne craignant alors plus mort et trépas, vivent au-dessus des nuages, dans cette perpétuelle et impossible quête d’approcher un peu plus le Paradis céleste réservé aux êtres évolués, mais avant toute autre chose, bien loin de leurs, jadis, repoussante humanité. Ils se voient au-dessus des lois, revendiquant leur supériorité infinie et leur statut caressant pour certain le divin.

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| Depuis quand tout est devenu compliqué ?

La religion, au même titre que d’innombrables autres faits humanistes, se voit complètement renversé et ébranlé par ce bouleversement du cycle de la vie. Sans surprise, nombre de croyants s’opposent fermement au retour des vivants par transfert de conscience, persuadé qu’une telle résurrection leur fermerait la porte du Paradis ; tandis que d’autres tentent de rester ouvert et de s’adapter. Dans un monde où vieillir n’est plus, la famille est, elle aussi, plus que perturbée. Comment la nouvelle génération peut-elle alors muer et s’élever, lorsque les parents persistent à régner ?

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Mais à force de vivre trop longtemps, cette supériorité, cette longévité rajoutée, finit par se retourner contre ces prétendus Dieux, dévorés par leurs propres pulsions et ambitions. Avec des cycles de la vie perturbés, les ainés qui ne vieillissent plus ne laissent plus la place aux générations suivantes, les générations futures, dorénavant bafouées par celle du passés — tristement auto-proclamé du présent, mais aussi du futur — se retrouvent condamnés à une éternelle jeunesse immature.

S’il y a une réalité qui n’a pas changé dans cet inquiétant futur, c’est bien que ces sombres pulsions qui guident nos Hommes d’aujourd’hui perdurent dans l’avenirs des leurs.

L’entourage devient, dés lors, dommage collatéral de leur perversité exacerbé. Privés de repères moraux et naturels, ces supposées élites perdent ce qui faisait d’eux des êtres humains, comme s’ils se dévoraient eux-mêmes par leur appétit insatiable, tel Ourobouros, le serpent qui se mord la queue. Une perversion bien démontrée par la famille Bancroft.

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| La technologie a évolué, les hommes sont restés les mêmes.

En effet, s’il y a une réalité qui n’a pas changé dans cet inquiétant futur, c’est bien que ces sombres pulsions qui guident nos Hommes d’aujourd’hui perdurent dans l’avenirs des leurs, qui s’apparentent, dorénavant, seulement à des animaux évolués.

Sexe, avidité et violence restent les principaux moteurs, péchés capitaux et primordiaux de cette société proposant ces services loin de manquer de clients, et plus que jamais dépourvue de toute honte et scrupule.

Sexe, avidité et violence restent les principaux moteurs, péchés capitaux et primordiaux de cette société proposant ces services loin de manquer de clients, et plus que jamais dépourvue de toute honte et scrupule à utiliser les nouvelles technologies pour satisfaire une clientèle en perpétuelle recherche de ce qu’elle ne trouve dans la réalité. Combattants à mort changeant d’enveloppe en cas de défaite, esclaves synthétiques propre à endurer les excès de violence des clients fortunés, fantasmes de toute sorte au travers d’un fantasmagorique nouveau pan virtuel…

Une adaptation du premier tome du « Cycle de Takeshi Kovacs », récipiendaire en 2004 du prix Phillip-K.-Dick

En s’affranchissant de l’enveloppe corporelle, la technologie des puces bouleverse également la barrière des genres, puisqu’une femme peut se retrouver dans le corps d’un homme, et inversement. Même si ce thème reste plutôt secondaire, il n’est pas sans susciter quelques réflexions troublantes… mais bien trop timidement abordées.

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| L’avenir est une porte, le passé en est la clé.

L’intrigue, arborant des allures d’enquête policière empreint d’un futurisme séducteur, si bien loin d’atteindre la magnifique complexité d’un « True Detective », contient néanmoins suffisamment d’éléments et de pistes potentielles pour susciter un intérêt. On devinera aisément qu’il y a là une base littéraire plus que solide — la série étant une adaptation du premier tome du « Cycle de Takeshi Kovacs », récipiendaire en 2004 du prix Phillip-K.-Dick —, et que tout ne découle pas de l’imagination d’un scénariste unique.

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Un ancien rebelle, Takeshi Kovacs, est ramené à la vie 250 ans après son déclin par un membre de l’élite, Laurens Bancroft. Ce dernier lui demande d’enquêter sur ce qui s’apparente à un suicide, mais dont il reste persuadé être un assassinat. Son enquête l’amènera à découvrir les perversions de Bancroft et de sa famille, en même temps qu’il comprendra que sa nouvelle enveloppe n’a pas été choisie par hasard.

Des cités futuristes, des engins volantes, des hologrammes omniprésents… Pour autant, il n’est pas question d’une débauche de moyen, projeté à la rétine des spectateurs en vue d’impressionner ce dernier.

On pourra regretter de ce récit le fait qu’un seul élément soit la cause de toutes les intrigues apparues au début de la série, l’histoire générale n’apparaissant pas aussi complexe qu’elle semblait l’être. Tandis que certaines pièces du puzzle semblent parfois être liées d’une façon artificielle.

| Tout pouvoir est violence.

C’est un constat qui saute aux yeux, Netflix a mis le paquet sur les effets spéciaux, qui n’ont rien à envier à une œuvre cinématographique. Des cités futuristes, des engins volantes, des hologrammes omniprésents… Pour autant, il n’est pas question d’une débauche de moyen, projeté à la rétine des spectateurs en vue d’impressionner ce dernier.

Par quelques fulgurances sentimentales, de scènes émouvantes sur une planète que l’on voudra forcément lointaine, d’un ciel habillé d’un couple de lune, une certaine touche lyrique et poétique surplombe de temps à autre ce techno-thriller.

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Il se peut, d’ailleurs, que l’on regrette ces passages-ci, sans toujours donner vraiment la possibilité de s’immerger dans cet autre monde dépeint, du moins au début — contrairement à son penchant cinématographique que l’on pourra difficilement taire « Blade Runner », qui était, pour sa part, des plus contemplatifs dans ses séquences de cité futuriste, aujourd’hui culte.

La nudité et le charnel mise en avant ne sont pas dénués de tout sens, mais visent, à fortiori, à la dénaturalisation de la sacralité et la pureté du « corps » au travers de ses scènes de sexe explicites et parfois osées.

D’autre part, la série n’est pas avare en scène de combat, souvent mené au corps-à-corps, et très efficace. Si, parfois, la pertinence de tels combats peut être remise en question, ils participent à procurer un certain plaisir coupable non-négligeable. Leur maîtrise, la qualité des effets spéciaux, et leur nombre, judicieusement disséminé au gré des épisodes, empêchent ainsi d’avoir l’impression qu’elles sont là pour meubler l’intrigue.

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| On ne fait rien dans ce monde sans avoir le diable au corps.

Il en va de même pour les scènes érotiques, puisque les corps nus ne sont, en effet, pas inusités, ceci sans jamais atteindre la fréquence d’un « Game of Thrones » — avec la sensation d’un cahier des charges à remplir. Il y a même un vrai aspect sensuel qui se dégage des scènes entre Takeshi et Ortega, qui se sont trouvés malgré toutes les tensions initiales.

La nudité et le charnel mise en avant ne sont pas dénués de tout sens, mais visent, à fortiori, à la dénaturalisation de la sacralité et la pureté du « corps » au travers de ses scènes de sexe explicites et parfois osées. Dans cet univers ou l’on ne possède donc plus que sa « conscience » ou « son âme », le corps n’y représente plus rien, si ce n’est qu’une simple enveloppe, qu’un banal réceptacle.

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| Les profanes voient les apparences.

Des effets spéciaux omniprésents, des scènes d’action et de sexe pour satisfaire un public masculin, une trame narrative qui aurait pu être plus complexe, cela suffit pour que certains reprochent à la série de tout miser sur l’apparence et de rien n’avoir à raconter, d’être belle mais creuse en somme. D’autant plus que, thèmes de science-fiction obligent, les technologies évoquent une multitude d’œuvres sorti avant et décrivant des mondes et univers futuristes.

La finalité nous permet alors de réfléchir sur la place de l’avidité du progrès et de la technologie au coeur de notre société. En demeure que cet excès, porté à son paroxysme, ne donne et ne donnera jamais rien de bon. Mais ne continuons-nous pas, malgré tout, à avancer dans ce sens ?

De quoi pousser des spectateurs à reprocher à la série de faire du « copier-coller » jugé paresseux… Omettant de fait que les œuvres s’inspirent mutuellement, et qu’un même thème — Intelligence Artificielle, mondes virtuels ou encore transfert de conscience — ne demeure pas apanage d’une seule œuvre unique, mais appartient bien plus au genre plus vaste de la science-fiction.

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Souvenirs après souvenirs, c’est avec envie qu’on se délecte des derniers épisodes, de surprise en surprise, de rebondissements en rebondissements. La finalité nous permet alors de réfléchir sur la place de l’avidité du progrès et de la technologie au coeur de notre société. En demeure que cet excès, porté à son paroxysme, ne donne et ne donnera jamais rien de bon. Mais ne continuons-nous pas, malgré tout, à avancer dans ce sens ?


Création · Laeta Kalogridis

Acteurs · Joel Kinnaman, Martha Higareda, James Purefoy, Chris Conner

Genre · Policier, Science-Fiction, Thriller

Nationalité · Américaine

Date de sortie · 10 janvier 2018

Durée · 10 épisodes – 55 min


BANDE-ANNONCE · ALTERED CARBON


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